RSOC Vol. 16 No. 21 2019 pp 5. Publié en ligne 01 août 2019.

Traitement d’urgence : ophtalmie du nouveau-né

Bolutife Olusanya

Maître de conférences et ophtalmologiste pédiatrique chef de clinique, Department of Ophtalmology, College of Medicine, University of Ibadan, Ibadan, Nigeria.


Aderonke Baiyeroju

Professeure et chef du service d’ophtalmologie pédiatrique, Department of Ophtalmology, College of Medicine, University of Ibadan, Ibadan, Nigeria.


Écoulement purulent abondant chez un nourrisson présentant une ophtalmie du nouveau-né. © TS Oluleye, University College Hospital, Ibadan, Nigeria.
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L’ophtalmie du nouveau-né peut entraîner une perforation de la cornée et une infection intraoculaire.

Le terme ophtalmie du nouveau-né décrit une conjonctivite qui se déclare chez l’enfant nouveau-né. Il s’agit d’une urgence ophtalmologique extrême en raison du risque élevé de perforation cornéenne et d’infection intraoculaire pouvant très rapidement entraîner la cécité1.

L’ophtalmie du nouveau-né affecte davantage les nourrissons dont la mère présente une infection par Chlamydia trachomatis ou par Neisseria gonorrhoeae (infections sexuellement transmissibles). La contamination des yeux du nouveau-né se produit durant l’accouchement.

Tableau clinique et diagnostic

L’ophtalmie du nouveau-né survient en général entre deux et 14 jours après la naissance. Le nouveau-né présente une rougeur et tuméfaction des paupières, des yeux « collés » et/ou un écoulement unilatéral ou bilatéral2.

Traitement

L’idéal serait de procéder à un prélèvement de l’écoulement afin d’identifier le microorganisme en cause. Toutefois, lorsqu’il est difficile d’avoir accès à un diagnostic de laboratoire, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) recommande d’administrer au nouveau-né à la fois un traitement contre l’infection gonococcique et un traitement contre l’infection à Chlamydia (voir encadré à droite).

Dans le cas d’une ophtalmie néonatale gonococcique, le traitement recommandé est l’administration d’une dose unique de ceftriaxone par injection intramusculaire (50 mg/kg de poids corporel, maximum 125 mg). Lorsque ce traitement n’est pas possible, la kanamycine ou la spectinomycine peuvent être des solutions de rechange2.

Dans le cas d’une ophtalmie à Chlamydia, le traitement recommandé est l’administration d’un sirop d’érythromycine, soit 50 mg/kg par jour répartis en quatre doses quotidiennes, pendant une durée de 14 jours2.

Quel que soit le microorganisme responsable de l’infection, irriguez et nettoyez les yeux au sérum physiologique à intervalles réguliers, afin d’enlever les sécrétions. Vous pouvez également envisager une antibiothérapie locale en traitement supplémentaire (pommade à l’érythromycine, par ex.). Envoyez en urgence le nouveau-né dans un service spécialisé si vous n’observez aucune amélioration au bout de 24 à 48 heures, ou si le nourrisson présente des signes de septicémie, par exemple température élevée ou basse, difficultés respiratoires, vomissements, perte de tonus ou perte de connaissance, ou encore refus d’allaiter.

Prévention

Avant la naissance, l’ophtalmie du nouveau-né peut être prévenue en traitant l’infection par Chlamydia trachomatis ou Neisseria gonorrhoeae présente chez la mère.

Après la naissance, on peut prévenir l’infection en nettoyan les yeux du nouveau-né avec du sérum physiologique et en appliquant une pommade oculaire antibiotique (par ex. tétracycline ou érythromycine).

Évitez si possible l’utilisation de nitrate d’argent, car celui-ci peut entraîner une conjonctivite chimique.

Différents types d’ophtalmie du nouveau-né

La conjonctivite à Chlamydia est l’ophtalmie néonatale la plus courante1. Elle survient généralement entrecinq et 14 jours après la naissance et se présente sous la forme d’une rougeur oculaire associée à un écoulement mucopurulent. Dans la plupart des cas, l’infection est légère ou modérée et la maladie est auto-limitante. Dans les cas graves, on peut observer une tuméfaction palpébrale et un oedème conjonctival. Dans les cas très graves, la maladie peut être associée à une infection des voies respiratoires.

Figure 1 Conjonctivite gonococcique purulente © Du Toit N et Van Zyl L

L’ophtalmie néonatale gonococcique est moins répandue que la conjonctivite à Chlamydia mais l’infection est plus grave, donc les parents du nouveau-né sont plus susceptibles d’amener leur enfant à l’hôpital. Elle se remarque deux à cinq jours après la naissance et se présente sous la forme d’un écoulement purulent très abondant (Figure 1), associé à une rougeur de la conjonctive et un oedème conjonctival très importants. On observe souvent une tuméfaction très importante des paupières. En l’absence de traitement, ou en l’absence de traitement adéquat, cette infection peut très rapidement entraîner une cornée trouble et une perforation, et aboutir à la cécité. Dans les cas très graves, le nouveau-né peut également présenter des complications générales telles une septicémie et une méningite.

Les affections pouvant présenter des symptômes semblables à ceux de l’ophtalmie du nouveau-né incluent la cellulite orbitaire, la dacryocystite, les suites d’un traumatisme lié à l’accouchement et le glaucome congénital.

Une conjonctivite chimique peut survenir chez le nouveau-né ; elle se présente sous la forme d’une conjonctivite bénigne avec écoulement mucoïde, rougeur oculaire et légère tuméfaction des paupières, et guérit spontanément dans un délai de 48 heures.

Références

1 Kapoor VS, Whyte R, Vedula SS. Interventions for preventing ophthalmia neonatorum. Cochrane Database of Systematic Reviews 2016; Issue 9. Art. No.: CD001862. DOI: 10.1002/14651858. CD001862.pub3.

2 World Health Organization. Guidelines for the Management of Sexually Transmitted Infections. February 2004. http://apps.who.int/medicinedocs/en/d/Jh2942e/3.6.html#Jh2942e.3.6/ (accessed 18 September 2018).