RSOC Vol. 05 No. 05 2008 pp 15 - 16. Publié en ligne 01 janvier 2008.

Aides visuelles pour l’enfant

Susanna MY Lee

Optométriste principale


Joseph CW Cho

Directeur
Hong Kong Society for the Blind, 248 Nam Cheong Street, Samshuipo, Kowloon, Hong Kong.

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Dans la plupart des cas, la fonction visuelle d’un enfant malvoyant peut être améliorée en associant modifications environnementales et aides visuelles.

Les modifications environnementales favorables suivantes peuvent être proposées : placer l’enfant près d’une fenêtre où il aura plus de lumière pour lire ; lui permettre d’écrire avec des stylos-feutres (car ils produisent un trait plus épais, ce qui rend l’écriture de l’enfant plus lisible) ; ou encore encourager l’enfant à porter un chapeau ou une casquette pour éviter d’être ébloui, en particulier à l’extérieur.

Les aides visuelles destinées à l’enfant malvoyant peuvent être réparties en trois catégories : aides optiques, aides non optiques et aides électroniques.

Aides visuelles optiques

La plupart des enfants souffrant de basse vision peuvent augmenter de façon significative leur acuité visuelle de près : soit en utilisant leur excellente capacité de mise au point sur des objets proches (accommodation), soit en plissant les yeux pour produire un effet sténopéique si leur pouvoir d’accommodation est insuffisant. Un enfant malvoyant obtient généralement le grossissement nécessaire en employant ce qu’on peut appeler « la méthode du rapprochement », c’est-àdire en rapprochant ses yeux de l’objet qu’il souhaite voir plus en détail. Le grossissement obtenu de cette façon est appelé « grossissement par la distance relative ».

Lorsque l’enfant ne voit pas suffisamment clairement un objet proche, il a alors besoin d’une loupe. Il en existe plusieurs types :

Lunettes grossissantes. Hong Kong Society for the Blind
Lunettes grossissantes. Hong Kong Society for the Blind

Lunettes grossissantes

Les enfants préfèrent souvent utiliser des « lunettes à verres grossissants » ; cela ne les gêne pas de lire ou de travailler de très près et, à leur âge, ils n’ont pas de grands bras, sont plus « souples » et s’adaptent mieux que les adultes. Les lunettes à verres grossissants offrent un large champ de vision et diminuent la fatigue oculaire ; l’enfant peut donc lire plus longtemps sans vite se fatiguer. (Par opposition, les adultes dont la vision diminue à un âge plus avancé n’aiment généralement pas lire de très près). Les lunettes à verres grossissants laissent les mains libres, ce qui est un autre avantage. Leur plus gros désavantage, par contre, est qu’elles imposent une faible distance de travail, ce qui entraîne des céphalées et des douleurs dans la nuque lors d’un usage prolongé.

Loupes à main. Hong Kong Society for the Blind
Loupes à main. Hong Kong Society for the Blind

Loupes à main

Les enfants malvoyants aiment utiliser les loupes à main parce qu’elles sont faciles à manipuler1. Elles offrent un grossissement « à géométrie variable » : l’enfant peut faire varier à son gré à la fois la distance entre la loupe et l’objet (ou le texte) et la distance entre son œil et la loupe. Plus la distance entre la loupe et l’objet est grande (à condition de demeurer inférieure à la distance focale de la loupe), plus le grossissement sera important. En diminuant la distance entre l’œil et la loupe, l’enfant augmentera également le grossissement. Il peut donc choisir la distance de travail qui convient le mieux à chacune de ses activités en lui procurant le plus de confort visuel, et ce, en fonction de la taille de l’objet ou du texte. Ce type d’aide visuelle offre à l’utilisateur de forts grossissements et un éclairage intégré ; c’est donc un bon choix pour les enfants qui ont besoin d’un apport de lumière important2, comme ceux qui présentent une rétinite pigmentaire ou une maculopathie.

L’utilisation d’une loupe à main nécessite toutefois une main ferme et une bonne coordination œil-main, en particulier pour les verres de puissances élevées. Ceci limite donc l’utilité de cette aide visuelle dans le cas des très jeunes enfants ou des enfants souffrant d’un handicap des membres supérieurs.

Loupes à poser. Hong Kong Society for the Blind
Loupes à poser. Hong Kong Society for the Blind

Loupes à poser

Une loupe à poser offre une image plus stable que des lunettes grossissantes ou une loupe à main. Cette aide visuelle est donc un bon choix pour les « débutants », surtout s’ils ont besoin d’un grossissement important. En outre, il est possible de bénéficier d’un éclairage intégré, généralement grâce à des piles situées dans le manche (ce qui rend alors la loupe plus encombrante). Par contre, les loupes à poser sont plus chères et plus encombrantes que les loupes à main ou les lunettes grossissantes ; il faut également pouvoir poser le pied sur une surface lisse.

Visolettes. Hong Kong Society for the Blind
Visolettes. Hong Kong Society for the Blind

Visolettes

Une visolette est une sorte de loupe bombée qui permet de multiplier le grossissement par deux lorsque l’on se rapproche de l’objet (grossissement par la distance relative) ou lorsque l’on utilise des lunettes grossissantes ou une loupe à main. Ces visolettes sont faciles à utiliser, mais elles n’offrent qu’un grossissement 1,8x.

Téléloupe. UNIFESP-B Brazil
Téléloupe. UNIFESP-B Brazil

Téléloupe

Une téléloupe permet de rapprocher plusieurs fois l’image d’un objet éloigné ; beaucoup d’enfants souffrant de basse vision aiment utiliser ce type d’aide visuelle. Une téléloupe avec un grossissement 4x peut rendre visible à 5 mètres un objet qui est en fait situé à 20 mètres ; un grossissement 8x peut ramener cette distance à 2,5 mètres. Une téléloupe peut être d’un grand recours à l’enfant dans ses activités quotidiennes : elle l’aide à lire ce qui est écrit au tableau, à lire le nom des rues et le numéro des bus. Pour pouvoir utiliser au mieux la téléloupe, les enfants doivent suivre une formation intensive qui leur apprendra à faire la mise au point et à rechercher des objets. L’utilisation de cette aide visuelle nécessite une bonne coordination œil-main pour rechercher l’objet ciblé, en particulier s’il s’agit d’une cible mobile.

Mesure de l’acuité visuelle avec une échelle à optotypes en E, en utilisant une loupe à poser. INDE. Karin van Dijk
Mesure de l’acuité visuelle avec une échelle à optotypes en E, en utilisant une loupe à poser. INDE. Karin van Dijk

Aides visuelles non optiques

Le recours à des aides non optiques permet de compenser certains désavantages présentés par les aides visuelles optiques. Par exemple, une table inclinable ou un pupitre permet de remédier au problème causé par les faibles distances de travail : l’utilisateur se tient mieux lors de l’exécution de la tâche et n’a pas à se pencher au-dessus de la table.

L’utilisation d’une lampe orientable permet de contrôler la direction de l’éclairage : ceci pourra aider les enfants qui ont besoin d’un apport de lumière plus important. En revanche, les enfants qui présentent des opacités comme les taies cornéennes sont très sensibles à l’éblouissement ; dans ce cas, on peut utiliser des filtres absorbants spéciaux, de préférence avec des écrans de protection sur les côtés, afin de filtrer la lumière diffuse. Chapeaux et casquettes sont recommandés pour les activités en plein air.

Les aides non optiques sont assez faciles à acquérir. On peut se les procurer dans les papeteries, les magasins de mobilier ou les magasins d’optique. Les parents, les enseignants et le personnel de santé peuvent également fabriquer eux-mêmes des dispositifs simples qui aideront les enfants à écrire ou à dessiner : ils peuvent par exemple découper des « fenêtres » dans du carton noir pour créer des fenêtres de lecture ou des guides pour le dessin et l’écriture ; ils peuvent aussi tracer à la règle des lignes noires épaisses sur du papier blanc, pour faciliter l’écriture.

Aides visuelles électroniques

Les aides visuelles électroniques offrent le plus grand champ de vision, les distances de travail les plus confortables et les plus forts grossissements. Malheureusement, ces aides visuelles sont aussi les plus chères.

L’aide visuelle électronique la plus utilisée est une caméra reliée à un téléviseur. Elle permet de contrôler soi-même la luminosité et le contraste ; c’est un bon choix pour les enfants qui présentent une déficience visuelle importante. Toutefois, parce que ce type d’aide visuelle est très lourd et encombrant, on ne le déplace pas et on l’installe généralement dans un lieu fixe, par example dans une bibliothèque.

Il existe des aides visuelles électroniques portables, mais elles coûtent très cher. Ce type d’aide visuelle est une caméra numérique, qui saisit les images et les agrandit selon le grossissement souhaité.

L’importance d’agir le plus tôt possible

L’utilisation précoce d’aides visuelles permet de renforcer les capacités visuelles des enfants souffrant de basse vision, en réduisant la privation visuelle dès le plus jeune âge. Les aides visuelles fournissent à l’enfant des informations visuelles plus riches et plus précises, ce qui améliore en retour ses capacités d’apprentissage et ses chances de scolarisation dans l’enseignement général avec des enfants voyants. De plus, lorsque les enfants apprennent à se servir d’aides visuelles dès leur plus jeune âge, ils les utilisent avec plus de facilité ; ensuite, quand ils grandissent, ils se sentent plus sociables et continuent à utiliser ces aides visuelles.

Facteurs importants pour la prescription d’aides visuelles

Dans tous les cas, pour prescrire une aide visuelle adaptée et satisfaisante, il faut bien connaître les antécédents de l’enfant, le diagnostic et le pronostic de son affection oculaire. Il faut recourir à des techniques adaptées pour obtenir des informations détaillées sur les vices de réfraction que présente l’enfant et sur ses capacités visuelles (acuité visuelle, champ visuel, amplitude de l’accommodation, sensibilité au contraste, adaptation à la luminosité, etc.). Le praticien doit également très bien connaître les fonctions et les caractéristiques des différentes aides visuelles, et savoir lesquelles d’entre elles pourront le mieux aider l’enfant dans les différentes tâches visuelles qu’il doit accomplir. Il est essentiel de former l’enfant à l’utilisation des aides visuelles et il est préférable qu’il puisse les essayer à la maison ; ceci doit être organisé immédiatement après l’évaluation initiale.

La première visite de suivi doit avoir lieu un ou deux mois après cette première évaluation. L’enfant aura eu suffisamment de temps pour s’entraîner avec l’aide visuelle prescrite, à la maison comme à l’école. Parce que les besoins visuels évoluent avec l’âge, il faut organiser des visites de suivi tous les trois à six mois. Ceci vaut également pour les enfants qui ont rejeté les aides visuelles durant les consultations initiales.

Impliquer les parents et les enseignants

Les enfants acceptent les aides visuelles plus facilement que les adultes et les utilisent avec plus de succès3. Ils ont tendance à utiliser différentes aides visuelles, en fonction de la tâche à accomplir : le nombre moyen d’aides visuelles prescrites à un enfant malvoyant varie de 1,3 à 2,33,4.

Pour optimiser l’utilisation des aides visuelles, il est essentiel de bien communiquer avec les parents et les enseignants. Il faut les encourager à noter les difficultés d’utilisation éventuellement rencontrées par l’enfant, en particulier lors de la période d’essai à la maison. Ils doivent être à l’écoute des enfants, qui peuvent éventuellement se plaindre des difficultés suivantes :

  • céphalées et douleurs dans la nuque, après une utilisation prolongée des aides visuelles
  • difficultés à mettre au point ; impression de champ de vision trop limité
  • ombre portée par l’aide visuelle sur l’objet que l’enfant veut regarder
  • distance de lecture beaucoup plus faible que d’habitude
  • aucune amélioration posturale ou aucune diminution de la fatigue oculaire.

Il faudra aborder ces points lors de la séance de suivi ; le praticien pourra alors faire les recommandations qui conviennent.

Ressources pour les aides visuelles

Beaucoup d’aides visuelles de qualité et à bas prix sont maintenant disponibles auprès du VISION 2020 Low Vision Centre (« Centre VISION 2020 de ressources pour la basse vision »). Ce centre fournit des aides visuelles à un prix abordable, allant de 0,4 dollars US (pour une loupe à main) à 60 dollars US (pour une caméra à relier à un téléviseur). Vous trouverez des informations sur le centre et les aides visuelles disponibles sur le site Internet de la Hong Kong Society for the Blind (en cliquant à gauche sur la section « Projects ») : www.hksb.org.hk

Références

1 Cho J, Cho P. Low vision findings in China and Hong Kong. In: Proceedings of the International Conference on Low Vision, 1996: 335-343.

2 Lee S, Chow B, Cho J, Au Yeung A. Preference of low-vision devices in the Hong Kong low-vision population. In: Proceedings of the International Conference on Low Vision 2005. International Congress series 1282, September 2005: 196-200.

3 Cho J. The preference of low vision devices of the Hong Kong low vision students. Papier presenté lors de la 12e World Conference of the International Council for Education of People with Visual Impairment 2006: EA034.

4 Cho J, Cho P. A survey of low vision patients in Hong Kong. In: Proceedings of the International Conference on Low Vision, 1999: 589-593.